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Libération 2

    Au tout début, il n'y a eu presque aucune répercussion visible. Des offres plus alléchantes de la part des grandes enseignes, quelques magasins bio qui fermaient et une structure de drive qui s'est écroulée. Et puis à la longue, ça a été la fermeture d'un discount de taille moyenne. Sur le coup, ça a fait un petit choc, mais comme d'autres grandes enseignes démolissaient pour rebâtir plus grand : le système survivait.

    Et puis, les grandes enseignes ont évidemment essayé de surfer sur la vague : ça a été la grande lessive, plus blanc que blanc. "Ayez confiance en nos produits, emballés en France, sans phosphate, sans colorant, sans plastique" : ils étaient prêts à promettre tout, y compris un savoir faire de plus de 150 ans pour les ressources renouvelables. Plus c'était gros, plus c'était sensé être convainquant. Le navire prenait eau de toute part.

    Finalement les très grosses structures ont fait des offres de plus en plus alléchantes, jusqu'à fermer à leur tour. C'était du jamais vu, de grandes enseignes nationales avec pignon sur rue qui coulaient, alors que le quincailler du coin, le boucher, le boulanger marchaient bien mieux. Les gens redécouvraient la campagne, l'art de faire pousser des choses qu'on mange soi-même, qu'on peut cuisiner ou mettre en conserve. Le verre est redevenu à l'honneur, les casseroles en cuivre et en fer, toute une façon de vivre a fini par renaître de ses cendres.

    Et puis les marchés se sont repeuplés insensiblement, les gens avaient besoin de se retrouver. On a aménagé les supermarchés désertés en halle, avec un coin jeu, avec des tables pour faire à la belote, au scrabble, à Carcassonne à ce qu'on voulait aussi longtemps qu'on voulait. Certains supermarchés modestes étaient réhabilités en centre pour SDF qui retrouvaient une adresse et une convivialité. 

    Évidemment, on dut se réhabituer à ne pas trouver de tout, tout le temps. Les denrées n'étaient pas disponibles en aussi grande quantité et il fallut réapprendre à faire durer les choses, à réparer ou à emprunter à la voisine en attendant le marché suivant. On fonctionnait suivant les saisons et insensiblement le rythme de vie changea aussi.


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